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Le droit du travailleur

Charles KELLER – 1873

 

Cette chanson, publiée en 1874, est connue sous plusieurs titres (ce qui témoigne de sa popularité dans les milieux ouvriers anarchisants de la fin du XIXè siècle) : Ouvriers prends la machine, L’Alsacienne, La Jurassienne, La Marseillaise des travailleurs.

Le refrain « Ouvrier, prends la machine, prends la terre paysans » restera pendant longtemps l’un des mots d’ordre des revendication de la classe ouvrière.

Engagé dans une compagnie de Franc-tireur en 1870, Charles Keller combattit en Alsace puis fis à pied le trajet de Mulhouse à Paris pour se  battre au côté des Communeux. Réfugié en Suisse, il rentre en France après l’amnistie.

 

NOTA :

Il est des mots et des comparaisons qui choquent et cette chanson en montre un bon exemple. Elle rapproche la condition ouvrière à celle de l’esclavage et compare les ouvriers à ceux-ci, utilisant sans retenue dans son premier couplet couplet et son refrain le mot « nègre ». Bien entendu c’est choquant mais c’est le reflet d’une époque ou ce mot et cette comparaison ne choquait personne et surtout semblait parfaitement utilisable pour décrire le monde. Personnellement – en 2025 – je ne cautionne pas l’emploi de celui-ci ni la comparaison qui en découle. Il n’empêche que le message de fond de la chanson demeure valide comme témoin de la fin du XIXè siècle.

 

Fabrice Lançon, Chansons de Mémoire Ouvrière Vol.1

Le droit du travailleur

Charles KELLER – 1873

1
Ouvrier, la faim te tord les entrailles
Et te fait le regard creux,
Toi qui, sans repos ni trêve, travailles
Pour le ventre des heureux.
Ta femme s’échine, et tes enfants maigres
Sont des vieillards à douze ans ;
Ton sort est plus dur que celui des nègres
Sous les fouets abrutissants.

Nègre de l’usine,
Forçat de la mine,
Ilote du champ,
Lève-toi peuple puissant ;
Ouvrier, prends la machine !
Prends la terre, paysan !
Ouvrier, prends la machine !
Prends la terre, paysan !

2
Paysan, le sol que ton bras laboure
Rend son fruit dans sa saison,
Et c’est l’opulent bourgeois qui savoure
Le plus clair de ta moisson.
Toi, du jour de l’an à la Saint Sylvestre,
Tu peines pour engraisser
La classe qui tient sous son lourd séquestre
Ton cerveau fait pour penser.

[REFRAIN]

3
Mineur, qui descends dès l’aube sous terre,
Et dont les jours sont des nuits,
Qui, le fer en main, dans l’air délétère,
Rampes au fond de ton puits,
Les riches trésors que ton pic arrache
Aux flancs des rocs tourmentés
Vont bercer là-haut l’oisif et le lâche
Dans toutes les voluptés.
[REFRAIN]

4
Qui forge l’outil ? Qui taille la pierre ?
Qui file et tisse le lin ?
Qui pétrit le pain ? Qui brasse la bière ?
Qui presse l’huile et le vin ?
Et qui donc dispose, abuse et trafique
De l’œuvre et du créateur ?
Et qui donc se fait un sort magnifique
Aux dépens du producteur ?

[REFRAIN]

5
Qu’on donne le sol à qui le cultive,
Le navire au matelot,
Au mécanicien la locomotive,
Au fondeur le cubilot,
Et chacun aura ses franches coudées.
Son droit et sa liberté,
Son lot de savoir, sa part aux idées,
Sa complète humanité !

[REFRAIN]

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