Historien – Reconstituteur – Conférencier – Médiateur culturel

A Biribi

Aristide Bruant – 1891

Cette chanson d’Aristide Bruant évoque non pas un lieu unique mais les divers camps des compagnies disciplinaires de l’armée française situés en Afrique du nord : les bagnes militaires.
Institués en 1818, ces bagnes concernaient non seulement les « camisards », c’est à dire les appelés ayant commis des fautes répétés (rébellion par exemple), mais aussi les « joyeux » condamnés avant le service et affectés au bataillons d’Afrique et les « exclus » ayant commis une faute avant le service, exclus – eux – de l’armée et utilisés pour des travaux forcés.
Célèbres pour la brutalité des sanctions comme la « crapaudine » (consistant à resté couché sur le ventre pieds et main liés dans le dos) ou le « silo » (fosse où le prisonnier devait resté nu) et surtout pour la brutalité des encadrants.
Les bagnes visent à contraindre, humilier, briser et déshumaniser les prisonniers avec violences (y compris sexuelles comme l’évoque la chanson), soumissions et vexations quotidiennes et répétées. Ils seront supprimés avec la décolonisation dans les années 1950 !

 

Tonio Gémène – A Biribi – Soldats, Conscrits et Déserteurs

A Biribi

Aristide Bruant – 1891

Y en a qui font la mauvais' tête  
Au régiment,
I's tir' au cul, ils font la bête
Inutil'ment
Quand i's veulent pus fair' l'exercice
Et tout l' fourbi
On les envoi' fair' leur service
A Biribi. A Biribi.

A Biribi, c'est en Afrique
Où qu'le pus fort
Est obligé d'poser sa chique
Et d'fair' le mort;
Où que l'pus malin désespère
De fair' chibi,
Car on peut jamais s'faire la paire,
A Biribi. A Biribi.

A Biribi, c'est là qu'on marche,
Faut pas flancher
Quand le chaouch crie : "En avant ! marche !"
I' faut marcher,
Et quand on veut fair' des épates,
C'est peau d'zebi :
On vous fout les fers aux quat' pattes
A Biribi. A Biribi.
A Biribi, c'est là qu'on crève  
De soif et d'faim
C'est là qu'i faut marner sans treve
Jusqu'à la fin !...
Le soir, on pense à la famille,
Sous le gourbi...
On pleure encor' quand on roupille,
A Biribi. A Biribi.

A Biribi, c'est là qu'on râle
On râle en rut,
La nuit on entend hurler l'mâle
Qu'aurait pas cru
Qu'un jour i' s'rait forcé d' connaître
Mam'zelle Bibi,
Car tôt ou tard il faut en être,
A Biribi. A Biribi.

On est sauvag', lâche et féroce,
Quand on en r'vient...
Si par hasard on fait un gosse,
On se souvient...
On aim'rait mieux, quand on s'rappelle
C'qu'on a subi,
Voir son enfant à la Nouvelle
Qu'à Biribi. Qu'à Biribi.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *