Lluís Llach – 1968
Travailler sur la chanson c’est découvrir de nouvelles mélodies, de nouveaux textes… Mais parfois c’est juste se faire frapper par une pièce issue de sa mémoire. Les premières notes, les premiers mots heurtent alors avec la force d’un bélier, laissant une trace comme la lumière d’un éclair striant la nuit. C’est le cas pour cette chanson, en ce qui me concerne, elle marque ma mémoire d’un souvenir brulant.
Cette chanson – d’abord composée en opposition à la dictature franquiste – devient rapidement un appel vibrant à la liberté par la lutte en commun. Fils d’un d’un dignitaire local franquiste, Lluís Llach devient comme chanteur, poète et activiste un opposant farouche à la dictature et un promoteur de la culture catalane. Cette chanson malgré son ton mélancolique possède des paroles d’une force peu commune.
Un enregistrement par Serge Utge-Royo dans Contrechants… de ma mémoire, volume 1
L’Estaca
Lluís Llach – 1968
L'avi Siset em parlava
De bon matí al portal,
Mentres el sol esperàvem
I els carros vèiem passar.
Siset, que no veus l'estaca
A on estem tots lligats?
Si no podem desfer-nos-en
Mai no podrem caminar!
Si estirem tots ella caurà
I molt de temps no pot durar :
Segur que tomba, tomba, tomba,
Ben corcada deu ser ja.
Si tu l'estires fort per aquí
I jo l'estiro fort per allà,
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
Però Siset, fa molt temps ja :
Les mans se'm van escorxant
I quan la força se me'n va
Ella es més ample i més gran.
Ben cert sé que està podrida
Pero és que, Siset, pesa tant
Que a cops la força m'oblida,
Torna'm a dir el teu cant
Si estirem tots ella caurà
I molt de temps no pot durar :
Segur que tomba, tomba, tomba,
Ben corcada deu ser ja.
Si tu l'estires fort per aquí
I jo l'estiro fort per allà,
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
L'avi Siset ja no diu res :
Mal vent que se'l va emportar,
Ell qui sap cap a quin indret
I jo a sota el portal.
I, passen els nous vailets,
Estiro el coll per cantar
El darrer cant d'en Siset,
El darrer que em va ensenyar.
Si estirem tots ella caurà
I molt de temps no pot durar,
Segur que tomba, tomba, tomba,
Ben corcada deu ser ja.
Si tu l'estires fort per aquí
I jo l'estiro fort per allà,
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
Si tu l'estires fort per aquí
I jo l'estiro fort per allà,
Segur que tomba, tomba, tomba
I ens podrem alliberar.
Grand-père Siset me parlait
De bon matin au portail
Tandis que nous attendions le soleil
Et regardions passer les chariots.
Siset ne vois tu pas le pieu
Auquel nous sommes tous attachés ?
Si nous ne pouvons nous en défaire,
Jamais nous ne pourrons marcher !
Si nous tombons tous il tombera
Et il ne peut tenir longtemps :
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Il doit être bine pourri.
Si tu le tire fort par ici,
Et que je le tire fort par là,
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Et nous pourrons nous libérer.
Mais Siset le temps est long :
Mes mains s'écorchent
Et quand la force me quitte,
Il est plus large et plus grand.
Je sais bien qu'il est pourri
Mais Siset, il pèse tant
Qu'à force la force m'oublie.
Redis moi ton chant...
Si nous tombons tous il tombera
Et il ne peut tenir longtemps :
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Il doit être bine pourri.
Si tu le tire fort par ici,
Et que je le tire fort par là,
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Et nous pourrons nous libérer.
Grand père Siset ne dit plus rien :
Un mauvais vent l'emporta,
Lui seul sait en quel endroit...
Et moi sous le portail
Et tandis que passent des jeunes gens,
J'étire le cou pour chanter
Le dernier chant de Siset
Le dernier qu'il m'a enseigné...
Si nous tombons tous il tombera
Et il ne peut tenir longtemps :
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Il doit être bine pourri.
Si tu le tire fort par ici,
Et que je le tire fort par là,
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Et nous pourrons nous libérer.
Si nous tombons tous il tombera
Et il ne peut tenir longtemps :
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Il doit être bine pourri.
Si tu le tire fort par ici,
Et que je le tire fort par là,
Sûr qu'il tombe, tombe, tombe !
Et nous pourrons nous libérer.
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